Tunnel de la Croix-Rousse
En bref
- 1845 : 1er projet de tunnel ferroviaire sous la colline de la Croix-Rousse.
- 1930 : 1er projet de tunnel routier par Camille Chalumeau, avec Robert Giroud.
- 1937 : 2nd projet par Lucien Chadenson, ingénieur de la Ville, et M. Thiollère, ingénieur des Ponts et Chaussées.
- 1939 : début des travaux.
- 1940-1948 : gros-œuvre pour le percement du tunnel.
- 1949-1952 : aménagements.
- 1950-1951 : destruction de l’église Saint-Charles située dans l'axe de sortie côté Saône et reconstruction d'une église plus moderne un peu plus loin.
- 19/04/1952 : inauguration du tunnel.
- 1999 : construction d'un muret pour séparer la chaussée de 2x2 voies.
- 9/07/2007 : le Grand Lyon approuve la rénovation du tunnel et la construction d'un nouveau tube pour les piétons, cyclistes et transports en commun.
- 2009 : début des travaux.
- 5/11/2012 : fermeture pour travaux du tunnel d'origine pendant 10 mois.
- 5/12/2013 : inauguration du nouveau tunnel.
- Longueur : 1 750 m., 1 757 après rénovation.
- Largeur : 14,60 m.
- Diamètre : 14,5 m.
- Profondeur : 80 m. sous la colline.
- Capacité : 4 000 véhicules par heure.
Franchir la colline de la Croix-Rousse
Un projet de longue date
Dès 1845, on imagine de creuser un tunnel sous la colline de la Croix-Rousse mais pour y faire passer les trains. Il faut attendre les années 1930 pour que le projet ressurgisse, cette fois-ci pour les voitures.
Un premier projet est soumis en 1930 par Camille Chalumeau, ingénieur en chef de la Ville de Lyon, à Édouard Herriot. L'ingénieur réunit une documentation auprès d'autres villes disposant d'un tunnel routier, et notamment auprès de Liverpool en Angleterre. L'architecte Robert Giroud y participe et propose un tunnel à 3 branches, dont l'une aboutit place de la Comédie, près de l'Hôtel de Ville, aux pieds d'une avenue à créer pour desservir la Croix-Rousse. Il dessine également plusieurs modèles pour chaque entrée du tunnel. Le maire de Lyon ne donne pas suite.
Il faut attendre 1937 pour que le projet de Lucien Chadenson, ingénieur de la Ville, et de M. Thiollère, ingénieur des Ponts-et-Chaussées soit proposé. Rapidement adopté, il est mis en adjudication au début de l’année 1939 et l’entreprise Borie commence aussitôt l’installation du chantier.
Améliorer la circulation automobile
Douze routes nationales aboutissent à Lyon, qui est une plaque tournante pour la circulation dans le Sud-Est de la France. Toutes se rejoignent dans le petit intervalle compris entre la place Bellecour et la place des Terreaux en raison de la topographie de la ville, car les collines de Fourvière et de la Croix Rousse constituent des obstacles. Avec l’augmentation du trafic automobile, des embouteillages continuels se forment en centre-ville, il faut donc trouver une solution.
On décide alors de relier le boulevard de ceinture préexistant à une autoroute située sur les bas-ports inoccupés, et de joindre cette boucle au faisceau des routes nationales venant de Paris et de Bordeaux. Pour ce faire, il faut imaginer un tunnel qui passerait sous la colline de la Croix-Rousse.
Un chantier d'envergure
Des moyens considérables sont déployés pour réaliser ce tunnel, situé à 80 mètres de profondeur. Plus de 125 000 kilos d’explosifs sont nécessaires, ainsi que 15 000 m3 de bois et 15 000 tonnes de ciment. Le gros œuvre, réalisé entre 1940 et 1948, mobilise un effectif moyen de 300 ouvriers. La question de l’évacuation des déblais, environ 400 000 m3 au total, se pose rapidement. Matériaux de grande valeur, ces déblais sont en grande partie utilisés pour l’empierrement de l’avenue Jean-Mermoz, ou encore dans le port Edouard-Herriot.
Une fois le tunnel percé, les aménagements commencent : forage des puits de ventilation de 1949 à 1952, puis équipement du tunnel : aménagement des galeries de ventilation, pose du revêtement intérieur, mise en place de l’éclairage, de la signalisation, des systèmes de sécurité…
Durant la période 1950-1951, l’église Saint-Charles située dans l’axe de la future entrée côté Saône, est démolie puis reconstruite un peu plus loin.
Au final, il s’agit d’un édifice d’environ 1 750 mètres de long pour 14,60 mètres de large, avec deux files doubles de circulation et un débit maximum de 4 000 véhicules par heure. Treize années auront séparé la mise en chantier de l’ouverture effective du tunnel, qui est inauguré par Edouard Herriot le 19 avril 1952. Huit jours après sa mise en service, sous l’effet combiné de la Foire de Lyon et de la curiosité des automobilistes, il est éprouvé par une circulation de 3 800 véhicules en 1 heure.
Après plus de 50 années d'utilisation, le tunnel se dégrade progressivement et doit fermer fréquemment pour en assurer la maintenance, en attendant des travaux plus lourds. La chaussée est aménagée en 2x2 voies sans véritable séparation centrale, jusqu'à la construction d'un muret en 1999. Son usage est interdit aux véhicules dont le poids total en charge excède 3,5 tonnes, à l'exception des autobus de la ligne C6. La vitesse est limitée à 50 km/h, ou 30 km/h par temps de pluie, et un radar automatique est installé à sa sortie ouest dans le sens Rhône-Saône.
Un second tunnel dédié aux piétons, cyclistes et transports en commun
Les travaux commencent en 2009 pour réhabiliter le tube d'origine et créer un tube supplémentaire dédié aux transports en communs, aux cyclistes et piétons. Ce tunnel, ainsi que les galeries d'évacuation le reliant au tunnel existant, sont percés principalement au moyen de 535 tirs d'explosifs, effectués à partir de novembre 2010 et achevés le 15 septembre 2011. Une membrane étanche et le coffrage de la voûte définitive en béton sont ensuite mis en place au moyen de coffrages roulants.
Ce nouveau tunnel est inauguré et ouvert à la circulation le 5 décembre 2013. Des scénographies installées par l'atelier Skertzo sous forme de séquences animées projetées sur les parois, sont progressivement aménagées. D'un très bel effet, elles posent en effet quelques problèmes de sécurité et l'éclairage doit être revu pour éviter les accidents.
En parallèle, le 1er tunnel est fermé le lundi 5 novembre 2012 pour une durée de dix mois, afin d'y effectuer des travaux de rénovation. Les parois sont désamiantées tandis que la chaussée, l'assainissement, la signalisation sont totalement refaits à neuf. Le tunnel est également mis au normes en vigueur, avec un accès de secours tous les 150 m et une ventilation assurée par les cinq conduits verticaux rénovés débouchant sur le plateau de la Croix-Rousse. Les galeries de secours donnent sur le nouveau tube des piétons, cyclistes et transports en commun, qui sert ainsi de tube d'évacuation en cas de sinistre. L'accès du nouveau tunnel routier est toujours limité à 50 km/h et interdit aux poids lourds.
L'ensemble de l'équipement est géré par la Métropole de Lyon.
Hommage de guerre
La visite du Général de Gaulle à Lyon en 1958 est l’occasion pour lui de rendre hommage à celui à qui il avait confié l’armée de libération dès 1943, Jean de Lattre de Tassigny, en inaugurant le pont qui porte désormais son nom1 .
Dès le percement du tunnel de la Croix-Rousse en 1952 avait été imaginé le projet de bâtir dans son axe un pont routier pour en assurer le débouché. Inscrit dans le cadre complexe de l’aménagement d’un carrefour à trois niveaux incluant l’axe nord-sud, il a été ouvert à la circulation le 18 février 1958. Mais curieusement, avant même le début des travaux en 1953, ce nouveau pont portait déjà un nom : Jean de Lattre de Tassigny. Sans doute le choix de cette dénomination, décidée par délibération du Conseil municipal du 28 janvier 19522, s’explique-t-il par l’admiration que lui portait l’exécutif lyonnais3 mais aussi par la proximité temporelle du décès –alors très récent– de Jean de Lattre de Tassigny, survenu seulement quelques semaines auparavant.
Il est vrai que le général de Lattre de Tassigny n’est pas un inconnu à Lyon... Suite au débarquement allié en Afrique du Nord en novembre 1942, la zone libre est envahie par les troupes nazies. Refusant de ne pas combattre, De Lattre de Tassigny est arrêté et emprisonné au fort de Montluc du 8 décembre 1942 au 9 janvier 19434 avant d’être jugé et condamné à 10 ans de prison. Parvenant à s’évader de la maison d’arrêt de Riom en septembre 1943, il se rallie à De Gaulle qui lui confie le commandement de l’armée B, devenue ensuite la 1ère armée puis l’armée de libération, chargée de libérer le territoire français. Jean de Lattre de Tassigny est de retour à Lyon le 5 septembre 1944 pour passer en revue les troupes ayant participé à la libération de Lyon5. Le 8 mai 1945, il est désigné par De Gaulle pour représenter la France à la signature de la capitulation allemande à Berlin aux côtés d’Eisenhower, Joukov et Montgomery.
Son nom a également été choisi pour dénommer une rue du 9e arrondissement de Lyon.
Notes
- Voir le film « Voyage du général De Gaulle à Lyon » mis en ligne par l’INA. À l’occasion de cette inauguration, la Ville de Lyon a également publié un album de photographies (Archives municipales de Lyon, cote 2PH/302).
- AML, registre de délibérations (cote 2018W/1 pages 329 et 330).
- Voir l’ « hommage rendu à la mémoire du Général de Lattre de Tassigny et attribution de son nom à un pont de Lyon » dans lequel la Commission générale évoque Jean de Lattre de Tassigny comme l’ « un de ses chefs militaires les plus prestigieux », comme « une figure de légende », comme un « héros » (procès-verbal de la séance du 14 janvier 1952, AML, 684WP/5).
- Une plaque mémorielle a été apposée sur le mur du fort rue Jeanne Hachette.
- AML, 1PH/2736/1. Voir aussi les films mis en ligne par l’INA : « Le général De Lattre dans Lyon libéré » et « Le général de Lattre de Tassigny assiste à une prise d’armes ».