Ainay : une abbaye, un quartier
Archives municipales de Lyon / Hall
DU 29 MAI AU 31 AOUT 2007
Située au sud de la presqu’île, connue sous le nom d'abbaye d’Ainay, l'église est ce qui demeure de l'ensemble de l'abbaye. Il s’agit de la seule église romane conservée en élévation à l’intérieur de la ville de Lyon et l’une des rares églises datées de la région grâce au passage du pape Pascal II qui la consacra en 1107 et la dédicaça à saint Martin, l’évangélisateur des campagnes et villes d’Europe.
On possède très peu d’information sur le passé d’Ainay, en revanche mythes et légendes sont nombreux. On rattache souvent le monastère à l’histoire des martyrs de 177 : Maturus et Sanctus, Attale et Alexandre, Blandine et Pontique y auraient été martyrisés et leurs cendres déposées sous l’autel d’une basilique construite en leur honneur… Selon certains, l’abbaye aurait été fondée vers l’an 612 par la reine Brunehaut, pour d’autres elle existait déjà au Vème siècle et, ravagée par les Vandales, elle aurait été relevée de ses ruines par cette même reine...
Si les premiers travaux se font à l'initiative de l'abbé Aurélien, ancien archidiacre d'Autun en 859, c'est Amblard, abbé d'Ainay, qui en sera le véritable rénovateur à partir des années 937. Il faudra prés de 150 années, vers 1102, pour voir se terminer ce chantier par l'abbé Gausserand. Mais l’abbaye d’Ainay a toujours joué un rôle important dans l’urbanisation de la presqu’île à partir du XIIIème siècle et surtout au XVIème siècle.
C’est la règle de Saint Benoît qui est observée à Ainay et, à la fin du Xe siècle, on y dénombre 21 moines. Les Bénédictins sont une trentaine au milieu du XIIe siècle et 50 au milieu du XIVe.
A la fin du XIe siècle on procède à la rénovation complète de la chapelle sainte Blandine, ornée d’un décor polychrome et considérée comme le bâtiment le plus ancien de l’abbaye. Le clocher-porche appartient vraisemblablement à cette nouvelle construction. Il est érigé en avant d’une église dont le plan est méconnu mais dont l’implantation contraint les constructions qui viennent s’y accoler expliquant ainsi leur désaxement.
Du XIIème au XVème siècle, l'abbaye a connu une prospérité remarquable et un véritable rayonnement, des travaux sont d’ailleurs entrepris au XVe siècle. Le bâtiment monastique oriental est modifié de manière importante par la construction de la chapelle saint Michel. Son implantation se fait au détriment de l’ancienne salle capitulaire.
Avec l’occupation de la ville en 1562 par les armées du baron des Adrets, les bâtiments de l’abbaye sont alors très endommagés.
En 1685, le pape Innocent XI sécularise l’abbaye qui devient collégiale transformant les moines bénédictins en chanoines. Au XVIIIe siècle, ceux-ci se séparent des terrains alentour en les vendant comme terrains à bâtir, il ne reste alors plus de l’abbaye que son église saint Martin.
Restaurations successives
Puis le bâtiment va connaître de nombreuses restaurations dont les interventions, entre 1820 et 1840, de l’architecte Pollet, qui modifient sensiblement l’aspect extérieur et le volume intérieur de l’église, notamment avec l’adjonction des chapelles latérales, la création des voûtes en plein cintre sur les nefs et, entre autres, la reconstruction des annexes de part et d’autre du clocher, couronnées de créneaux...
Après son classement au titre des monuments historiques en 1840, diverses autres restaurations se succéderont dans la période 1840-1869 : démolition du presbytère, percement de la rue d’Ainay et reconstruction d’un nouveau presbytère, nouveau décor peint, restauration de la crypte ; puis entre 1870 à 1900 : restauration intérieure de sainte Blandine et ouverture des arcades nord, construction d’une nouvelle sacristie et de la nouvelle chapelle dédiée à la Vierge.
D’importants travaux d’urbanisme ont gommé le plan primitif de l’abbaye depuis le XVIIe siècle du fait des nombreuses percées de rues et des travaux de Michel-Antoine Perrache qui obtient, en 1777, l’autorisation du Consulat de démolir les remparts entourant l’abbaye érigés un siècle plus tôt. Les maisons des chanoines sont vendues. Au XVIIIe siècle, du vieux monastère seule subsiste l’abbatiale…
L’étude archéologique
En dépit de sa richesse architecturale, l’abbatiale d’Ainay n’a pas véritablement fait l’objet d’une étude approfondie depuis la monographie, en 1935, de l’abbé Chagny, la plus complète sur l’abbaye d’Ainay. L’auteur propose une analyse architecturale extrêmement fouillée qui est mise en perspective avec les sources textuelles et iconographiques médiévales, modernes et dix-neuvièmistes.
Depuis ce travail, plusieurs chercheurs ont tenté d’affiner les hypothèses qui concernent l’évolution architecturale et chronologique de l’abbatiale sans apporter d’éléments véritablement novateurs. Et il faut attendre 1996 et la rénovation des parements intérieurs de la chapelle sainte-Blandine, pour qu’une première analyse archéologique du bâti soit enfin réalisée.
La restauration des parements extérieurs de l’ensemble abbatial, exécutée de juin 2005 à septembre 2006, a représenté la phase la plus importante depuis le XIXe siècle et a offert l’opportunité au Service archéologique de la Ville de Lyon, sous la direction d’Isabelle Parron, de réaliser une lecture fine de cet édifice.
Les investigations archéologiques sur les bâtiments en élévation ont ainsi été réalisées dans le but d’en comprendre l’évolution en essayant de les replacer dans le temps et d’appréhender les techniques et les savoir-faire utilisés par les hommes de l’art au cours des siècles.
Nettoyage d’ensemble, décroûtage des parements muraux, prélèvements, relevés des moulures, des graffitis et des profils, photographies et relevés graphiques mis au net ont servi de base à la création des restitutions qui découlent de l’interprétation des vestiges. Ces recherches ont été accompagnées d’une étude des sources textuelles et iconographiques conservés dans les différents fonds d’archives, municipales, départementales et nationales.
La confrontation de cette documentation avec les informations issues du terrain permet aujourd’hui de reconstituer une histoire globale de cet édifice millénaire.